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GLACIERS ET CLIMATS :

"NE FAISONS PAS DIRE AUX GLACIERS
CE QU'ILS NE DISENT PAS !"

par

Robert VIVIAN

Professeur des Universités, Glaciologue

 

   > 3 - On nous dit que les glaciers, à cause du "réchauffement global", sont en recul catastrophique. Non. C'est faux.
  Voici quelques arguments pour prouver que la deuxième moitié du XXe siècle a été marquée plutôt par une stabilisation et une avancée des glaciers... que par un recul.

  3-1 Nous prenons à dessein nos exemples dans les Alpes car les glaciers alpins sont souvent ceux que l'on utilise dans la presse de l'Europe occidentale pour évoquer cette "disparition annoncée" des glaciers. C'est à leur propos qu'a été publiée la thèse de certains glaciologues pessimistes (ou optimistes, c'est selon !) affirmant - à partir de modèles utilisant les bilans glaciaires - que les glaciers alpins dans leur globalité avaient perdu plus de 50 % de leur surface en un siècle... et que le prochain siècle pourrait leur être fatal !
 Affirmations plutôt pessimistes on en conviendra, et "modèles" dont on commence à douter de la pertinence : ne dit-on pas déjà que les scénarios envisagés ont été surestimés d'un facteur 2 (C. Vincent - SHF 2001) !

  Dans la deuxième partie du XXe siècle, les glaciers ont subi, pour beaucoup d'entre eux, des avancées sensibles (1970 -1995) limitant les effets de décrue, et ce sont les glaciers les plus grands et dont les bassins d'alimentation se trouvent à des altitudes élevées, qui ont la plus grande capacité de résistance à l'ablation.

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Nota bene

  Une évidence : les petits glaciers (les glaciérets), ou encore ceux que l'on définit comme "résiduels", généralement situés aux marges des zones de glaciation, ceux qui sont les moins élevés en altitude, qui sont exposés au Sud, ou qui ont des vitesses annuelles inférieures à 10-20 mètres par an etc., sont naturellement cruellement affectés par la moindre variation positive des températures estivales. Leurs pertes sont considérables, elles peuvent atteindre pour le siècle dernier près de 60% ; on peut même programmer la disparition pure et simple de certains d'entre eux. Mais relativisons les choses. Sachons que dans l'ensemble des Alpes occidentales, les glaciers dont la surface est inférieure à 10 hectares ne représentent que 2,5 % (epsilon en terme de volume !) du millier de glaciers qui y ont été répertoriés (R. Vivian 1974).

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  3-2 Dans les Alpes donc, mais dans les autres régions du monde aussi, où les signes actuels d'avancées glaciaires sont pareillement enregistrés :
  - en Scandinavie (Norvège, Spitsberg) : bilans positifs et avancée de fronts glaciaires ;
  - dans le Karakoram : crues d'un certain nombre de glaciers entre 1994 et 1996 (K. Hewitt, 1998) ;
  - en Alaska (Bagley Icefield System) : autres avancées enregistrées en 1996 ;
  - au Groënland : les études de la NASA montrent que, s'il y a bien des phénomènes de fusion et des reculs des masses glaciaires en bordure de la mer, ils sont largement compensés par des accumulations dans la partie centrale et haute du centre du Groënland (c'est l'humidité générée par la fusion des langues glaciaires qui alimente ces surcharges neigeuses puis glaciaires du centre de l'île-continent) ;
  - en Antarctique : de pareils phénomènes existent, les élévations de la température dans ces secteurs très froids se révélant favorables à une augmentation des précipitations neigeuses donc à terme, à une augmentation des volumes de glace ;
  - dans les Hielos Patagonicos des Sud Chili et Argentine.

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  Dans les régions inter-tropicales au contraire (Equateur, Pérou, Bolivie) les petits glaciers qui ne doivent leur existence qu'à de fortes altitudes - données le plus souvent par des volcans -, reculent et semblent fortement affectés par les effets Niño-Niña. Le glacier Antizama marque pourtant une crue sensible depuis deux ans (B. Francou, SHF 2001).


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  3-3. Quelle est donc la réalité alpine ? Regardons de plus près quelques documents.

      a - Les fluctuations des glaciers du versant Nord du Mont-Blanc (document L.Reynaud ; Glaciologie CNRS)

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      - Si l'on s'intéresse à l'ensemble de la période 1870-2000, on constate pour tous les glaciers un certain nombre d'analogies de comportement : crues de 1890 et de 1920 ; très sérieux recul dans les années 50 et 60 ; crue pour les années 70 et 80 jusqu'en 90 ; décrue de 90-92 à 99 et depuis 3 ans : reprise de la crue pour le glacier des Bossons. Dans l'ensemble, les reculs ont été en moyenne, pour chaque glacier étudié, de l'ordre de 700 mètres. Dans la totalité des Alpes occidentales, le pourcentage de perte en surface, en un peu plus d'un siècle, se situe entre 30 et 35% (545 km2 contre 830 km2).

      - Pour la seule deuxième moitié du siècle, les fluctuations peuvent être qualifiée - au contraire - de stationnaires, en crue (1980) ou en très léger recul... inférieures à 100 mètres (surtout après 1990). Depuis 1998, on note une reprise sur le front des Bossons, glacier dont les comportements sont toujours la sonnette d'alarme de changements climatiques dans le massif du Mont-Blanc. Sera-ce la même chose sur les autres glaciers ? Attendre et voir !
      L'étude des profils transversaux est pareillement édifiante.

  Cette appréciation corrobore les résultats enregistrés sur quelques glaciers suisses du Val d'Hérens (document de L. Hulot in A. Bezinge, RGA n°4, t.88, 2000) où l'on voit très nettement que les glaciers, depuis les années 60, ont subi un coup d'arrêt non négligeable dans leur régime de décrue assurant aux glaciers un régime de stabilité positive, voire de nette avancée (exception pour le glacier Roseg).

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      b - La crue de 1980 enregistrée sur le front du glacier d'Argentière (photos R. Vivian)

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1971         1975         1981

  Spectaculaire crue des années 80 sur la langue d'Argentière ! Le glacier avance au niveau du front mais surtout gonfle à l'aval de la chute de séracs de Lognan jusqu'à menacer l'existence d'un pylone de téléphérique. Ici sont présentées trois vues prises au même lieu.
  - en
1971 le glacier est encore loin de la base du pylone (à noter la roche polie par un passage antérieur du glacier) ;
  - en
1975 le glacier est arrivé au pied du pylone (bourrelet morainique de poussée qui a recouvert la zone de roche polie) ;
  - en
1981 le glacier est ici épais d'une vingtaine de mètres (seule dépasse le haut du pylone). La circulation du téléphérique est perturbée. Des travaux de dégagement de la glace sont nécessaires pour le passage de la cabine du téléphérique.

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      c - La crue sur le versant sud du massif du Mont-Blanc (documents A. Cerutti et P. Fusinaz)
      - Glacier de la Lex Blanche:
            . de 1954 à 1970 avancée de +600 mètres
            . de 1961 à 1989 avancée de +740 mètres
      - Glacier de la Brenva :
            . de 1954 à 1992 avancée de +490 mètres
      - Glacier de Toules :
            . de 1963 à 1990 avancée de +200 mètres
      - Glacier de Pré-de Bar :
            . de 1963 à 1989 avancée de +240 mètres
            . de 1989 à 1999 recul de -120 mètres.

  Ce dernier exemple, dans son développement le plus récent (-120 mètres) confirme le caractère cyclique des fluctuations glaciaires. La façade sud du Mont-Blanc, qui a été essentiellement affectée dans la deuxième partie du XXe siècle par des phases d'avancées, a entrepris depuis le début des années 90 une phase de recul... en attendant la prochaine récurrence !

  Alors, peut-on vraiment évoquer à la lumière de ce triple constat, les effets d'un réchauffement global, d'origine anthropique, comme cause de la variation glaciaire enregistrée au cours de la deuxième partie du XXe siècle !? À l'évidence, la réponse est NON.

  Tout prouve qu'au contraire, le fort recul des années 1920-1960 est le plus souvent enrayé et que demain, contre toute attente, nous pourrions bien continuer à enregistrer, au contraire de ce qui nous a été dit, des fluctuations glaciaires positives.

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  Pendant cette deuxième moitié du XXe siècle, on ne note aucun comportement anormal de glaciers qui contrasterait avec ce qui a été vécu dans les siècles précédents : certains glaciers reculent à côté d'autres qui avancent, dans un autre secteur du massif, dans une autre partie de la chaîne, dans une autre partie du globe, etc. C'est la raison pour laquelle, depuis le début du XXe siècle, les glaciologues ont pris pour principe de refuser l'idée de "fluctuations périodiques" et que, peu à peu, on s'est rendu compte qu'à cause d'autres facteurs (topographiques, géologiques, morphologiques...), les glaciers doivent être considérés comme des indicateurs imparfaits du climat, quand bien même leurs variations ont un rapport évident avec les influences climatiques. Par ailleurs, pour être légitimés, les résultats des fluctuations glaciaires d'un groupe glaciaire doivent se ventiler et s'exprimer en valeur relative (X% reculent, X% avancent, X% sont stationnaires...).

  En première approximation l'évolution du glacier dépend des précipitations hivernales et des températures estivales. Mais si nous entrons dans le détail, nous pouvons voir que la variation glaciaire n'est nullement dépendante d'une moyenne des températures ou des précipitations mais de leur répartition dans le temps (distribution selon les mois de l'année) et dans l'espace (rôle des données hypsométriques du glacier).
  Les données utilisées doivent être beaucoup plus fines que des moyennes annuelles : à l'échelle de la saison, du trimestre, du mois, du jour. En 1957, au glacier de Saint-Sorlin (massif des Grandes Rousses), Ch. P. Péguy avait constaté par la mesure, qu'une chute de 10 cm de neige en une journée du mois d'août avait retardé d'un mois la saison d'ablation !
   

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